Surexploitées, polluées, ou encore asséchées par la canicule,
les réserves d’eau potable sont mises à mal. Ce qui laisse présager une pénurie
d’eau d’ici quelques décennies.
Des nappes souterraines en danger
Comme
l'annonce le bureau de recherches géologiques et minières (BRGM) dans son bilan
publié le 22 septembre 2003, la sécheresse et la canicule exceptionnelles du
printemps et de l'été ont entraîné une baisse record du niveau des fleuves et
des nappes d'eau souterraines en Europe. Une baisse « particulièrement longue et amplifiée
par d'importants prélèvements ».
Même si
le récent épisode de sécheresse n'a pas arrangé l'état des nappes d'eau
souterraines, celles-ci sont surtout victimes d'une exploitation excessive.
Ainsi, dans un rapport publié en juin 2003, le Programme des Nations Unies pour
l'Environnement (PNUE) tire la sonnette d'alarme : les nappes d'eau
souterraines, dont dépendent deux milliards de personnes pour l'alimentation et
l'irrigation, sont soumises à « une pression de plus en plus
intenable ».
Ces
réservoirs naturels, qui renferment près d'un tiers des réserves terrestres
d'eau douce, sont surexploités dans certaines régions du monde pour les besoins
des grandes villes, de l'industrie et de l'agriculture. Parmi les pays
concernés, le PNUE cite l'exemple de l'Espagne, où plus de la moitié des 100
aquifères (réservoirs d'eau souterrains) recensés sont soumis à une exploitation
excessive. Au Mexique, le nombre d'aquifères surexploités est passé de 32 à 130
en 25 ans. Dans le Midwest américain, le niveau de la nappe phréatique a baissé
en moyenne de trois mètres ces dernières décennies.
Autre
problème : la pollution. Pesticides, bactéries, engrais et déchets industriels
peuvent contaminer durablement les nappes . C'est le cas des nitrates utilisés
en agriculture, qui s'infiltrent dans le sol et polluent les eaux phréatiques.
Pénurie annoncée dans certaines régions
L'eau
douce est une denrée rare et précieuse : elle ne représente que 2,5 % de toute
l'eau présente sur terre, le reste étant de l'eau salée. Or, selon
l'Organisation Météorologique Mondiale, « une grave pénurie d'eau risque de
se produire d'ici 50 ans », conséquence d'une mauvaise gestion des réserves,
de la pollution et de la poussée démographique. Déjà, aujourd'hui, plus d'un
milliard de personnes n'ont pas accès à l'eau potable. La consommation d'eau
dans le monde a été multipliée par six en un siècle.
D'ici
2025, la quantité d'eau disponible par personne pourrait tomber à la moitié du
niveau actuel – qui est déjà deux fois plus bas que celui de 1960. D'ici 2050,
selon les Nations Unies, entre 2 et 7 milliards d'êtres humains seront
confrontés à une pénurie d'eau. Parmi les régions les plus menacées, on trouve
notamment le bassin méditerranéen (en particulier l'Afrique du Nord) et la
péninsule arabique.
Comment faire face ?
Mieux
gérer la demande d'eau est aujourd'hui une priorité : on estime qu'au moins un
tiers de l'eau prélevée dans le monde est gaspillée (fuites dans les réseaux
d'approvisionnement, irrigation excessive en agriculture…). Dans son rapport, le
PNUE préconise notamment de limiter l'activité agricole dans les pays pauvres en
eau, et de promouvoir pour l'exportation d'autres activités moins gourmandes en
eau « comme la fabrication de briques ou le textile
».
Autre
problème : l'inégalité des pays devant les ressources en eau. Celles-ci varient
de moins de 100 m3 à plus d'un million de m3 par personne et par an, selon la
région du monde. Des projets de transfert d'eau entre pays existent, notamment
entre la France et l'Espagne (par un canal qui apporterait l'eau du Rhône en
Catalogne). Mais ces projets se heurtent souvent à des problèmes
géopolitiques.
Enfin,
les progrès technologiques permettent aujourd'hui de puiser l'eau là où elle est
la plus abondante : la mer. Des usines de dessalement transforment l'eau salée
en eau douce consommable. C'est le cas par exemple à Malte (où plus de la moitié
de l'eau douce provient du dessalement) et dans les pays du Golfe. Mais le
dessalement reste une solution très onéreuse.
De l’eau douce au fond de la mer
Il
existe au fond des mers de véritables sources d’eau douce, issues du
jaillissement de rivières souterraines. Ces sources peuvent-elles être
exploitées par des pays en manque d’eau ? Une expérience a été tentée avec
succès en juillet 2003 à moins d’un kilomètre des côtes françaises et
italiennes, au large de Menton et Vintimille. Une société spécialisée, Nymphea
Water, a réussi à capter la source de la Mortola, à 36 mètres de profondeur. Le
système doit être testé pendant un an. Reste que de telles sources offrent des
quantités d’eau modestes à l’échelle des besoins d’un pays (en France, les eaux
souterraines marines ne représentent que 1,5 % de l’ensemble des eaux
souterraines) . De plus, la technique d’extraction est
coûteuse.
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